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LA NUIT DU 12 De Dominik Moll 2/2

« La nuit du 12 » fut tourné en 34 jours, les scènes d’extérieur à Grenoble et Saint-Jean-de-Maurienne, et les scènes d’intérieur de la PJ à Ivry-sur-Seine. 

   La météo a bouleversé l’atmosphère du film dont le tournage a débuté au mois d’octobre pour les extérieurs. Dominik Moll pensait filmer sous un temps maussade et pluvieux. Mais c’est le soleil qui s’est étonnamment invité lors de toutes ces prises de vues, entraînant une captation radieuse, l’éclat du soleil créant une tonalité lumineuse inopinée et engendrant une dissonance opportune avec la gravité de cette histoire dramatique. Ce qui engendra un travail différent pour le directeur de la photo qui a dû modifier sa lumière en fonction de la tonalité des extérieurs. P. Ghiringhelli explique : « Sur le décor reconstitué dans un bâtiment désaffecté d’Ivry-sur-Seine, j’ai travaillé pour la première fois avec des projecteurs automatiques. Soit quatre unités placées à l’extérieur du décor (situé au 1er étage du bâtiment). Comme on devait y rester quinze jours, avec beaucoup de scènes à filmer, la rapidité de réglage de ces unités, la très grande latitude de couleurs restituées me permettaient de passer presque instantanément de scènes solaires à des ambiances plus grises, ou d’une ambiance matinale à celle d’un après-midi. On a également veillé à conserver le côté un peu chaud de l’architecture 70’s (symbolisé entre autres par les portes oranges), pour éviter le cliché des commissariats froids en open space qu’on voit souvent à l’écran. » (AFC) Quant au cadrage, D. Moll a décidé de donner une belle profondeur de champ à ses plans, en usant en majorité de courtes focales et donc de grands angles. Les gros plans sont effectivement rares dans « La nuit du 12 », excepté sur quelques scènes particulières.

   Un cinéaste a eu pour lui beaucoup d’importance quant au choix de mise en scène : Rodrigo Sorogoyen (cf « Madre » ou la série « Antidisturbios »). Sa manière de recourir à « l’extrême grand angle » a captivé l’intérêt de D. Moll. Dans Canal Blog, il justifie cela : « J’ai voulu utiliser les grands angles, un peu comme le fait Rodrigo Sorogoyen et éviter les plans serrés et gros plans pour que les enquêteurs puissent faire corps avec leur environnement et inscrire les personnages dans les décors. (…) Il fallait absolument éviter un traitement télévisuel, sensationnaliste et complaisant, je préfère la sobriété ou l’ellipse, il était impensable d’exploiter la souffrance. » De cette manière D. Moll donne vie aux locaux de la PJ malgré leur exiguïté, ainsi qu’aux autres décors où il prend un certain recul pour mieux capter ses personnages dans leur contexte. Quant à la scène de meurtre, le cinéaste et le directeur de la photo se sont beaucoup interrogés sur la forme visuelle qu’ils désiraient, refusant d’« être complaisant dans la représentation de la violence ». La sobriété était de mise. Quelques très gros plans sur les yeux de la jeune femme ou sur le briquet s’enchaînent avant de s’éloigner de l’horreur qui s’ensuit, la caméra filmant fixement, dans un plan vraiment large, le cauchemar que vit Clara. Nous restons donc à distance, paralysés, hébétés par ce que nous voyons.

   « La nuit du 12 » est un film bouleversant où les enquêteurs nous font plonger dans la médiocrité du mal, dans l’ineptie barbare, mais aussi dans leur frustration face à un travail harassant, obsédant, où les recherches ne mènent souvent à rien. Cette terrible affaire de féminicide paraît insoluble, minant le moral de Yohan et Marceau. Chacun y réagit différemment, suivant ses expériences et sa personnalité. Y-a-t-il une once d’espoir lorsqu’on évolue dans un milieu en proie à la détresse humaine, à la lâcheté, à l’indifférence ? Peut-il y avoir une lumière ?

 

 

Sortie : 13/07/22

Réalisation : Dominik Moll / Scénario : Dominik Moll et Gilles Marchand / Direction de la photographie : Patrick Ghiringhelli / Son : François Maurel / Montage : Laurent Rouan / Décors : Michel Barthelemy / Costumes : Dorothée Guiraud / Production : Haut et Court / Producteurs : Barbara Letellier et Carole Scotta / Distribution : Haut et Court

Distribution : Bastien Bouillon (Yohan) ; Bouli Lanners (Marceau) ; Pauline Serieys (Nanie), Lula Cotton-Frapier (Clara) ; Anouk Grinberg (La juge d’instruction) ; Mouna Soualem (Nadia) ; Theo Cholbi (Willy) ; Johann Dionnet (Fred) ; Thibaut Evrard (Loïc) ; Julien Frison (Boris) ; Paul Jeanson (Jérôme)